jeudi 24 mai 2012

La démocratie est à l’Assemblée, pas à l’Elysée !

Jean-Claude Mamet, Convergences et alternative Romainville (93), 21 mai 2012

Depuis la cérémonie de passation des pouvoirs entre Sarkozy, le battu, et Hollande, l’élu, nous recevons un déluge d’images et de commentaires émus sur le président « normal ». Il ne fait aucun doute que pour la salubrité de la vie publique, cela vaut mieux que le show sarkozien écoeurant de 2007. Mais il ne faut pas s’y tromper : François Hollande, comme Mitterrand en son temps, enfile les habits d’un système de pouvoir foncièrement hiérarchique, monarchique, où le pouvoir d’un seul homme décide du sort du pays.
Le spectacle est maintenant donné au pouvoir de nomination : du président sur le 1er ministre, puis sur les heureux-ses « nominé-e-s » du gouvernement, sans qu’à aucun moment le peuple n’ait d’autre mot à dire qu’à s’émouvoir d’une Mme Aubry renvoyée à ses foyers ou à d’autres petites vengeances de ce genre.
Autrement dit, l’élection présidentielle commande toute la vie politique et en irradie toutes les conséquences. Comme si l’élection des député-e-s qui commence maintenant n’était qu’un détail complémentaire. Nous rencontrons d’ailleurs des citoyens qui nous disent, lorsque nous leur tendons des tracts sur les législatives : « Mais c’est fini les élections, non ? ». Leurs interrogations en disent long sur le formidable rapt anti-démocratique de la présidentielle et sur le nécessaire travail politique de fond pour renverser cet état d’esprit.
Pour nous et pour le Front de gauche, la démocratie véritable, c’est d’abord l’Assemblée élue, avec des député-e-s dont la légitimité dépend d’abord du suffrage universel, et donc de la délibération politique de tou-te-s les citoyen-ne-s. Le gouvernement lui-même ne devrait pas procéder du président, mais de l’Assemblée. Et l’exécutif devrait être étroitement contrôlé par les élu-e-s du peuple.
Simultanément, le pouvoir populaire prend également racine dans les luttes sociales (occupation de leur usine par les Fralib qui veulent faire prévaloir leur contre-projet), les mobilisations citoyennes, les mouvements écologiques (aéroport de Notre Dame des Landes !) ou territoriaux, la solidarité entre peuples d’Europe et du monde (Grèce !). Et il y a nécessité que le pouvoir populaire issu des luttes se dote également d’institutions autonomes.
Ainsi luttes et suffrage universel se complètent et se répondent dans une démocratie qui s’auto-organise et s’approfondit. Voilà notre programme de fond pour représenter le pouvoir et le projet d’une société débarrassée de tout despotisme, de toute oppression et domination.
Tout de suite, nous devons agir pour que le Front de gauche ait la plus forte représentation possible à l’Assemblée nationale. Cela peut aussi vouloir dire un front commun de la gauche si une menace existe d’un duel final FN-UMP, mais le débat doit être porté sur la place publique. Aucune combinaison tactique ne peut réduire le poids politique menaçant du Front national, qui déploie ses tentacules dans une droite de plus en plus UMPénisée. Pour battre le FN, il n’y a qu’une seule voie : gouverner à gauche, vraiment, clairement, à 100%.
Le Front de gauche a d’ores et déjà un programme de mesures d’urgence et de propositions de lois. Pour s’attaquer à la richesse et à la finance (le seul ennemi de F. Hollande, faut-il le rappeler ?), des décisions immédiates peuvent être prises avant juin.
  • Relèvement du SMIC (1700 euros), avec un signal donné à tous les salariés que la reconquête des salaires est en route, inversant le partage inégal salaires-profits que l’on connaît depuis 1982;
  • Campagne publique pour un audit citoyen de la dette, avec une adresse aux peuples d’Europe : nous sommes solidaires face à la finance et certaines dettes seront purement et simplement annulées.
  • Adresse aux peuples d’Europe que le Traité budgétaire Merkozy aggrave la crise de manière suicidaire et doit être annulé. En France, un référendum le confirmera si le moindre doute existe.
  • Face à l’avalanche de plans de licenciements et de fermetures d’entreprises (une vingtaine de situations recensées), un moratoire national peut être décidé. Jean-Luc Mélenchon s’est adressé au nouveau président pour proposer des mesures donnant aux salarié-e-s le droit de veto sur les décisions patronales et la possibilité légale de faire valoir des contre-projets (blog : www.jean-luc.melenchon.fr).
Au-delà des urgences immédiates, des projets de lois devront être popularisés dans tout le pays afin que le rapport des forces se déplace vraiment à gauche dans le débat public et se traduise par un groupe puissant du Front de gauche.
Simultanément au bras de fer européen incontournable pour refuser la légalisation de l’austérité (traité Merkozy), le gouvernement engagera le budget 2013. Celui-ci devra obligatoirement comprendre, pour les recettes, un volet fiscal radicalement en rupture avec les complaisances qui durent depuis plus de dix ans avec les hauts revenus. Ce ne sont pas seulement les
multimillionnaires qui doivent être visé-e-s, mais un vrai retour à l’impôt proportionnel, dont l’abandon coûte des dizaines de milliards d’euros aux finances publiques, un vrai rétablissement de l’impôt sur la fortune, et la suppression simultanée de la TVA sur les produits de première nécessité.
Les finances publiques sont en crise, et donc à la merci des marchés financiers et des profiteurs de la dette, à cause de l’insuffisance des recettes, et non du trop-plein de dépenses. C’est le message que le Front de gauche et un authentique pouvoir de gauche devraient populariser dans le pays et au-delà en Europe, afin de clouer le bec aux intégristes libéraux de la troïka (BCE,
Commission, FMI) qui étrangle la Grèce, l’Espagne et tous les peuples.
Pendant la campagne des présidentielles, beaucoup de personnes nous disaient : « Je suis d’accord avec vous, mais je veux d’abord virer Sarkozy ». Virer Sarkozy, nous l’avons fait ensemble ! Les quatre millions de voix du Front de gauche ont compté. Maintenant, il faut donner au Front de gauche un poids politique maximal. Nous appelons au débat les électeur-trice-s de
Hollande et du Parti socialiste. Les projets de Hollande et ceux du Front de gauche rendent un gouvernement commun impossible. Le compte n’y est pas. Il faut changer cette situation.
La vraie gauche, c’est avec le Front de gauche ! Donnez vos voix à ses candidat-e-s !

1 commentaire:

  1. Au delà des incantations et demandes de changements, il faudrait trouver de quoi convaincre une majorité de citoyens.
    Or nous sommes loin du compte.

    Une des premières tâches serait de comprendre la haine qui sourde chez une grosse partie de l'électorat. Pourquoi tant de citoyens, 'ordinaires' comme vous et moi, ressentent-ils tant de haine envers les gauches en générale et l'extrême gauche ou la gauche de la gauche ?

    [Incidemment, il y a là un vrai problème de nommage !
    Extrême g. ? Gauche de g. ? g. démocratique ? Front de/des g. ? ... si on veut 'rassembler' il faut nommer clairement.]

    Une fois cette haine comprise, au minimum analysée, il s'agira d'élaborer des remèdes pour la faire reculer.

    Certes il existe pour une bonne part des mensonges ou à-peu-près répétés et répandus par une propagande efficace. De même nos médias de masse parviennent à maintenir un niveau d'inculture, d'ignorance indéniable.

    Ceci ne change pas notre faute collective : incapacité à changer le monde qui s'abîme devant nous et en toute conscience.
    La population VOIT les désastres du capitalisme mais se refuse à en tirer les conséquences. Et nous (à gauche de la gauche ...) à en déterminer une stratégie efficace.
    Nous sommes des nuls, car cette situation empire depuis des dizaines d'années sans que nous parvenions le moindre peu à y changer qqchose.

    Il faudrait donc changer de méthode si l'on souhaite vraiment changer ce monde.
    Je ne vois rien venir.

    Non-pas qu'il n'existe pas de nombreuses et louables initiatives, aucune ne parvient à convaincre dans les actes institutionnels (votes ..) nos citoyens - une majorité.
    La victoire contre Sarkozy est indéniable, n'a-t-il pas tout fait pour se faire détester ?
    Mais vous le savez parfaitement, le PS ne fera RIEN contre le système actuel en voie de déconfiture.
    Suffira-t-il d'attendre un désastre social ?
    Mais pour quels changements ?

    En discutant avec 90% de la population on parvient à se mettre d'accord sur l'état catastrophique du système.

    Et pourtant aucune majorité n'osera le mettre à bas sans un couteau dans le dos, une réelle peur-panique, comme dans les circonstances les plus dramatiques de l'histoire nous le montrent.

    Il reste tout à faire pour se débarrasser non pas du système, puisque tout le monde est d'accord pour le changer, mais de son acceptation par la population.

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